INSTITUT FRANÇAIS DE L'ÉDUCATION

Outils personnels
Vous êtes ici : Accueil » Enjeux de mémoire Colonisation - décolonisation Ressources Algérie Fiche sur le FLN

Fiche sur le FLN

Une mise au point sur la manière dont le FLN s'est imposé comme le seul représentant de la nation algérienne pendant la guerre d'Algérie. Par Valérie Morin (Histoire-Géographie)



Comment le FLN s’est-il imposé comme seul représentant de la nation algérienne pendant la Guerre d’Algérie ?



Une rapide analyse des différents mouvements politiques existant en Algérie avant l’insurrection, ainsi que leurs rapports entre eux durant la guerre, nous permettra de mieux comprendre par quels moyens et selon quelle stratégie le FLN a réussi à s’imposer comme le seul représentant de l’indépendance algérienne.


Les mouvements politiques musulmans en 1954


Ils peuvent se regrouper en 4 mouvements :
  • L’UDMA (Union Démocratique du Manifeste Algérien) de Ferhat ‘Abbas qui est favorable à une autonomie par rapport à la métropole

  • Les Oulémas, mouvement religieux, tentaient de réformer l’islam et renouveler la culture arabe de l’Algérie sur le modèle égyptien.

  • Le PPA, clandestin, fondé par Messali Hadj, le plus ancien parti nationaliste, interdit aux lendemains des événements de mai 1945. Sa vitrine légale est le MTLD (Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques). Il possède également une organisation militaire secrète, l’OS (Organisation Spéciale).

  • Des luttes internes au MTLD conduisent certains militants, anciens de l’OS, à constituer un Comité Révolutionnaire d’Unité et d’Action (CRUA) qui donna naissance au FLN (Front de Libération Nationale) et au déclenchement de la lutte armée, le 1er novembre 1954.


Les ralliements des premières années de l’insurrection (1954-1956)


L’entrée dans la lutte armée oblige tous les autres mouvements à se définir par rapport au FLN.  Celui-ci exige l’adhésion des individus mais pas des mouvements car il refuse toute idée de division. Il considère que les échecs du passé sont dus aux divisions au sein des mouvements nationalistes. L’engouement des éléments les plus jeunes et les plus radicaux pour l’action, le refus des autorités françaises de toutes réformes politiques et la violence de la répression conduisent la plupart des mouvements nationalistes à se rallier au FLN.

Les « centralistes » du MTLD (frange la plus favorable à une « troisième voie » politique) se rallient en mars 1955, ceux de l’UDMA en avril 1956, après la fuite de Ferhat ‘Abbas vers l’Egypte. Les Oulémas, après avoir, dans un premier temps, condamné la lutte armée, intègrent à leur tour le FLN, le 7 janvier 1956. Le PCA (Parti Communiste Algérien), pris au dépourvu par les événements, tente de constituer des maquis pour éviter la fuite de ses militants vers le FLN. Après négociations (mais aussi luttes) les maquis communistes sont intégrés dans l’ALN (Armée de Libération Nationale) en juillet 1956 . Enfin, les élus de la communauté musulmane adhérèrent, pour la plupart, au FLN en septembre 1955 et refusèrent alors de poursuivre toute activité au sein des institutions françaises.

Avec la création, le 24 février 1956, de l’Union Générale des travailleurs Algériens (UGTA), le FLN s’empare du monde syndical jusqu’alors dominé par les communistes et les messalistes.


La guerre civile MNA-FLN


Si le MTLD-MNA  a l’avantage de l’ancienneté, le FLN a celui de la lutte armée. Les messalistes sont surpris par le 1er novembre. Rapidement, ils se rangent dans le camp de la lutte et créent des maquis notamment dans le Constantinois, en Oranie, dans les zones proches de la Kabylie. Le MNA est puissant à Alger où il organise des attentats terroristes en avril 1955 et encadre très fortement l’émigration algérienne en France.

Le problème est que le FLN et le MNA ont le même objectif mais la question du pouvoir dans la Révolution les orientent peu à peu vers une lutte ouverte. A partir du début de l’année 1956, toute tentative de conciliation est impossible et les deux camps s’affrontent dans une véritable guerre civile dont le symbole le plus célèbre reste le massacre du village messaliste de Mélouza par le FLN. L’armée française est parfois utilisée pour régler ses comptes avec l’autre camps (dénonciations, ralliement ).

En France, le FLN entend se concilier l’émigration algérienne de gré ou de force. Il créé la Fédération de France du FLN et conduit la guerre civile jusqu’en métropole. Des assassinats de cadres sont commis par les deux camps . A partir de 1957, le FLN prend le dessus en France comme en Algérie.

Cette guerre civile, outre les morts, aura des conséquences importantes. L’Algérie a perdu « une grande part de ses forces vives dans les luttes intestines », selon l’historien Mohamed Harbi.


Les négociations avec la France


Derrière cette guerre civile, est présente la volonté hégémonique du FLN d’être le seul interlocuteur politique de la France. A partir de 1956, le FLN peut être considéré comme la force politique dominante en Algérie. Il a le soutient de l’Egypte de Nasser et l’aide des deux autres pays maghrébins qui accueillent l’ALN.

A partir de la formation du GPRA (Gouvernement Provisoire de la République Algérienne), en septembre 1958, puis de la reconnaissance du principe de l’autodétermination , le FLN acquière un statut quasi officiel au niveau international ; le GPRA est reconnu par les Etats-Unis. Les membres du GPRA sont reçus dans plusieurs pays socialistes (Chine, Viêt Nam, Corée) et participent à la conférence des pays non-alignés en 1961. Les ralliements des anciens adversaires se multiplient, chacun espérant avoir des postes dans le futur Etat algérien.

Le gouvernement Français cherche pourtant à organiser une « troisième voie » face à la domination du FLN. Il tente de la constituer parmi les élus musulmans de l’après 1958 et la bourgeoisie algérienne enrichie grâce au Plan de Constantine. Ce parti prônerait une politique gouvernementale d’association avec la France. Cette « troisième voie » échoue face à la peur (assassinat du sénateur algérien Chérif Benbalylès) et au peu d’audience que la frange modérée possède dans la population algérienne : elle s’est trop décrédibilisée en acceptant de participer à des élections truquées ou, du moins, contrôlées par l’armée française.

Des tentatives sont faites pour négocier avec le MNA mais aussi pour diviser le FLN – le gouvernement tente de jouer sur les divisions internes au mouvement – comme c’est le cas lors de la prise de contact de l’entourage du général de Gaulle avec Si Salah, commandant de la Wilaya IV, qui tentait de négocier un cessez-le-feu (juin 1960). Après l’échec de ces tentatives, le gouvernement français se résout à n’avoir que le FLN pour seul partenaire.


Les problèmes internes au FLN


Il est impossible de refaire en quelques lignes l’ensemble des divisions et des rivalités internes au FLN. Ce qui est important de souligner est la séparation de plus en plus grande qui s’est faite tout au long du conflit entre les forces de l’intérieur, les Wilayas (maquis), et les forces de l’extérieur, l’ALN. A mesure que l’armée française contrôlait les frontières, les combattants de l’extérieur (stationnés en Tunisie et au Maroc) se sont coupés de l’intérieur. A partir de 1961, le FLN a l’assurance qu’il sera le maître de l’Algérie indépendante. Les rivalités s’exacerbent alors à l’intérieur de sa structure surtout entre les membres du GPRA, considérés comme trop modérés, et les membres de l’ALN. Le gouvernement provisoire qui négocie avec la France n’a pas la confiance de l’armée. Celle-ci cherche alors à compromettre le GPRA dans les négociations avec la France afin de se présenter comme le seul défenseur des aspirations nationales. C’est pourquoi les Accords d’Evian sont rejetés par les membres de l’état-major.

Si le GPRA entend, après le cessez-le-feu utiliser les wilayas pour éviter la reconstitution des partis musulmans et conserver au FLN le monopole politique, il perd toute autorité lors de l’indépendance. C’est la vision de la future Algérie qui est aussi au centre des dissensions. Le programme de Tripoli (1962) transforme le FLN en un parti révolutionnaire, populiste et musulman, qui romps avec le caractère laïc qu’il avait au début de la guerre.

L’indépendance, en juillet 1962, consacre donc la victoire du FLN mais ouvre la porte à des luttes intestines – entre wilayas et ALN - qui prolongent les combats de plusieurs mois. La victoire des militaires sur les civils (coup d’Etat de Boumediene, 1965) marque définitivement le visage politique de l’Algérie contemporaine.


Bibliographie sommaire


  • Harbi Mohamed, Le FLN, mirage et réalité, des origines à la prise du pouvoir (1945-1962), Ed. J.A. 1980, 446 pages.
  • Elsenhans Hartmut, La guerre d’Algérie, 1954-1962. La transition d’une France à une autre, le passage de la IVème à la Vème République, Publisud, 1071 pages. (voir les chapitres II.9, la formation du FLN page 210-219,  VIII.4.1, les élections pour rallier une contre-élite, pages 824-830 et VIII. 4.2, Contacts avec des groupes rivaux du FLN, pages 830-842).


Une mise au point
Actions sur le document
CONTACTS

ECEHG

Institut national de recherche pédagogique
19 allée de Fontenay
BP 17424
69347 LYON Cedex 07

Tél. 04 72 76 61 00
Fax 04 72 76 61 10

enseigner-apprendre@inrp.fr

Equipe

Responsable et chargée de recherche
Corinne Bonafoux, Maitre de conférence à l'Université de Chambéry

Chargées d'études

  •  Sophie Ernst, PRAG